2011: Assises à AGEN : l'enfant et le conflit familial

En 2011 "l'enfant : otage, enjeu du conflit familial"

Les 23 et 24 juin 2011, l'association CJM-AVIC47 de Agen, dans le Lot et Garonne et Hubert BONIN, président de l'INAVEM ont accueilli les congressistes des XXVIes Assises nationales des associations d'aide aux victimes.

Le thème choisi cette année, "l'enfant : otage, enjeu du conflit familial" a offert à tous les intervenants des AAV et également à de nombreux partenaires professionnels intéressés par les questions de l'enfant, de la famille, des enjeux familiaux tant en matière civile que pénale, une journée et demi d'interventions de grands professionnels et spécialistes, nationaux et locaux.

En préliminaire, les élus locaux, la présidente de l'association locale ont présenté ce qui faisait l'intérêt de ces assises à Agen. Ensuite le président de l'INAVEM a pu interpellé le représentant du garde des Sceaux retenu à l'assemblée nationale, le directeur du cabinet François Molins, qui lui a répondu.

Dans une premier temps, Benoît BASTARD, Sociologue, chercheur CNRS, Daniel AJZENBERG, psychiatre et psychanalyste et Claude LIENHARD, Avocat, Professeur de Droit, ont positionné un certain nombre d'éléments contextuels, chacun dans leur domaine.

Ensuite, le thème "De la prévention à l'accompagnement : prise en compte de la famille" a été abordé.

Puis trois cercles de discussion sur :
1- Les enlèvements parentaux
2- Le rôle de l'administrateur ad hoc
3- La place du parent non gardien et du grand-parent,
avec des magistrats, avocats, travailleurs sociaux, juristes, psychologues qui ont présenté leur expérience et dialogué avec la salle.

Le lendemain, vendredi 23 juin, le thème de "L'enfant : aliénation parentale et parole de l'enfant" a été traité sous l'angle de la clinique par Liliane DALIGAND, membre du conseil scientifique de l'INAVEM, par les solutions de droit et de procédure, avec Emmanuel Abentin, magitrat et Olga Odinetz, présidente d'ACALPA a apporté son regard sur le phénomène qu'elle dit extrèmenet marginal mais qui doit être reconnu absolument.

Et enfin les conséquences de cette prise d'otage... sur l'enfant sur son identité, son développement futur, dans le contexte scolaire et dans le cadre de violence intra-familiale.

 

Pour terminer, Michèle de Kerckhove a réalisé une rapide synthèse de ce colloque :

L'ENFANT : enjeu ou otage du conflit familial
Une première approche à caractère sociologique souligne les changements et transformations de la famille dans la diversité de ses configurations (familles monoparentales, recomposées ou homoparentales) en raison d'une augmentation du nombre de divorces.
Il est apparu nécessaire de dissocier la conjugalité (situation qui a un caractère précaire car réversible) de la parentalité (qui s'inscrit beaucoup plus dans la durée).

L'ENFANT
L'enfant est souvent utilisé comme une arme ou un vecteur du conflit familial.
L'enfant a besoin avant tout que l'on satisfasse ses besoins fondamentaux et d'être aimé quelle que soit la famille dans laquelle il se trouve.
Dès sa naissance il imprime et capte les sensations dans lesquelles il est en souffrance.
Si celles-ci persistent, cela peut induire des troubles du comportement à l'âge adulte.
Il existe une ambiguïté entre le désir de protection de l'enfant (en l'éloignant de l'un de ses parents par exemple) et celui de maintenir les relations avec ses deux parents.

LE CONFLIT
La séparation fait émerger ou exacerbe un mode de fonctionnement qui existe de façon latente.
L'enfant devient un enjeu et /ou un arbitre de la séparation.
Il est également l'objet de compétition entre les parents qui lui imposent leur décision.
S'il a été témoin de violence, elles peuvent entraîner des conséquences traumatiques qui se traduiront par une plus faible estime de lui-même, de l'anxiété, de la détresse voire le passage à l'acte.
Le syndrome d'aliénation parentale n'est pas une maladie psychiatrique mais un trouble de l'enfance qui survient exclusivement dans un contexte de disputes autour de la garde de l'enfant.
L'enfant dénigre son autre parent sans aucune justification.
Le parent aliénant manipule son enfant, lequel le perçoit comme étant une victime ce qui entraîne une rupture du contact avec l'autre parent.

Pour pouvoir distinguer ce syndrome d'une simple manifestation de rejet qui n'est pas obligatoirement une manifestation d'emprise, il convient d'identifier un certain nombre de facteurs :
- le dénigrement de l'autre parent
- une rationalisation absurde pour le justifier
- une absence d'ambivalence
- le sentiment d'être un penseur indépendant
- le support à l'autre parent de façon inconditionnelle
- l'absence totale de culpabilité
- la présence de scénarii imaginés
- une extension de l'animosité à l'entourage.
En effet d'autres intervenants peuvent participer au conflit et au travail d'élimination.
Le parent aliénant réussit à convaincre l'enfant de la véracité de sa version notamment dans les allégations d'abus sexuels ou autres.
Le travail de reconstruction peut prendre de très nombreuses années.

Quelles sont les réponses à ces situations de souffrance ?
Dans certaines juridictions 70 % du contentieux est à caractère familial.
Le droit est un outil, le conflit n'est pas forcément un litige mais une séparation peut entraîner un conflit et les mots peuvent l'attiser.
Le conflit est souvent circonscrit autour de l'enfant alors qu'il peut avoir une cause économique et patrimoniale.
Le lien biologique peut aussi être une source de conflit.
S'il n'a pas été possible de sortir du conflit par des accords en médiation alors il faudra trouver d'autres réponses.

La réponse para-judiciaire
116000
Ce numéro européen, aujourd'hui opérationnel dans 15 pays, dédié aux familles enfants disparus, permet par une coopération entre les pays pour répondre aux situations d'enlèvements parentaux et de fugues.
Les fugues représentent la majorité des cas de disparition.
L'espace Schengen favorise les disparitions transfrontalières.
En 2010, 3619 cas de disparitions ont été traités par l'intermédiaire de ce numéro en Europe.
En France, l'INAVEM qui héberge le 116 000, a enregistré en 2010, 859 dossiers dont 30 % d'enlèvements parentaux.
Elle a reçu 7500 appels dont seulement un quart concerne réellement l'objet de ce numéro, du fait de sa gratuité.

La médiation civile familiale
Son champ d'action est vaste (relations transgénérationnelles, personnes âgées ou dépendantes, successions etc.).
Elle peut être un outil en permettant de confronter les points de vue au travers d'échanges de manière à trouver une solution.
La médiation vient au service de l'enfant, le sort du rôle d'arbitre et lui permet de trouver sa place et de faire travailler ses parents.
Les parents se responsabilisent autour de l'enfant.
La médiation désarme les parents et les recentrent autour de l'intérêt de l'enfant.

La médiation pénale familiale
Le point d'entrer en est l'infraction (non représentation d'enfants, défaut de paiement de pension alimentaire, enlèvement parental etc.).
Il y a travail sur le conflit et la souffrance des parents et l'intérêt de l'enfant.
Il faut verbaliser les souffrances et obtenir un accord des parties après rétablissement du dialogue.
Si un danger est évoqué, il faut alors l'objectiver.
Cependant la réponse pénale peut parfois se révéler nécessaire.
La France a d'ailleurs fait l'objet d'une condamnation pour faute lourde par la cour d'appel d'Aix-en-Provence et la CEDH pour déni de justice dans un dossier où 30 plaintes avaient été déposées sans réponse pénale.

Les rencontres médiatisées
Dans le cadre d'espaces rencontres

La réponse judiciaire
Les juges d'instruction, juges pour enfants ou aux affaires familiales sont souvent confrontés à la souffrance de l'enfant.
L'administrateur ad hoc est obligatoirement désigné dans les affaires d'inceste depuis la loi de 2010.
Le rôle de l'AAH est d'être au côté de l'enfant, de nouer avec l'avocat une relation de confiance, de tenir un rôle pédagogique d'accompagnement afin de rendre supportable le parcours pour des faits souvent insupportables.
L'AAH va préparer l'enfant aux différentes étapes de la procédure en partenariat avec l'entourage éducatif.
Recueillir la parole de l'enfant permet d'avoir un reflet de l'intensité dramatique de la situation.
Il faut parfois cependant s'en méfier. L'enfant s'exprime mais le juge décide.

CONCLUSION
L'enfant sera durablement marqué par le vécu pendant l'enfance et les images imprimées.
S'il peut se construire, le passage à l'acte est cependant parfois possible.
Les prises en charge psychologique, d'accompagnement, les médiations sont quelques-unes des réponses à cette nécessité de responsabiliser les parents autour de l'intérêt de l'enfant et de préparer celui-ci à devenir un adulte.

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