Films bande annonce
Ce petit film sous titré en français vous permet de découvrir en 1'20" les protagonistes infracteurs et victimes qui reviennent sur une mesure de justice restauraitve : rencontres entre personnes condamnées et personnes victimes.
Films de 6 mn
1- En français
2- Sous-titré en anglais
Vidéos extérieures
Ce qu'est la justice restaurative par Robert Cario (IFJR)
Les mesures de justice restauratives par Robert Cario (IFJR)
Retranscription : Pour Sabrina Bellucci, directrice de l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation, «les rencontres détenus/victimes nous troublent, (...) mais nous permettent aussi d'envisager l'autre différemment, avec une lecture complexe, plus humaine».
A l'occasion de la Conférence de consensus sur la prévention de la récidive, qui vient d'avoir lieu, on a découvert en France une notion qui nous était jusque-là étrangère : le concept de justice restaurative. « Restaurative », comme « restauration des liens sociaux ». On dit aussi parfois « réparatrice », comme « réparation des torts subis ». Explications.
La justice restaurative n'est pas nouvelle, puisque les tribus aborigènes et les communautés amérindiennes la pratiquent traditionnellement pour ressouder les liens mis à mal par une injure, une trahison ou un crime grave au sein d'une communauté. Généralement, ce sont les « sages » de la tribu qui permettent au dialogue de reprendre entre les parties offensées.
Mais depuis un certain temps déjà, cette justice se développe aussi dans nos sociétés modernes, avec un double objectif : prendre en compte la douleur des victimes tout en forçant les auteurs des faits à une plus grande responsabilisation.
Au départ, ce sont des pasteurs mennonites qui se sont chargés de répandre la bonne parole en Amérique du Nord et au Canada. Mais la justice restaurative est désormais l'affaire de tous, et de façon tout à fait laïque, que ce soit au Brésil, en Nouvelle-Zélande, et même en Belgique francophone, où elle a fait une percée remarquable, au point d'être inscrite dans la loi.
Prendre la mesure de l'acte
Pour Robert Cario, professeur de criminologie à l'Université de Pau, la justice restaurative est d'abord et avant tout une justice qui a le souci de tous. Car selon lui, « aujourd'hui, la justice pénale focalise assez massivement ses interventions sur l'auteur des faits et plus accessoirement sur la victime en termes d'indemnisation. Mais elle ne prend pas en compte ou n'a peut-être pas pour mission non plus de prendre en considération les proches des victimes, pas plus que les proches de l'auteur des faits. »
A l'inverse, « la justice restaurative, c'est une justice complémentaire du système actuel, qui va travailler sur les conséquences de l'acte, par exemple sur les répercussions qu'un viol peut avoir sur un conjoint. On va aussi pouvoir enfin poser toutes les questions qui n'ont pas pu être posées lors du procès pénal », estime Robert Cario.
Première rencontre entre détenus et victimes en France
Ainsi, alors que la justice classique regarde plutôt vers le passé pour comprendre qui a commis l'acte criminel et comment, afin de le sanctionner de la façon la plus juste possible, la justice restaurative s'efforce, elle, de regarder vers une reconstruction possible, vers l'avenir. Pour le pasteur Brice Deymié, aumônier national des prisons pour la Fédération protestante de France, « la justice restaurative, c'est partir du principe qu'en cas de délit ou de crime, ce n'est pas d'abord une loi qui est transgressée mais des liens qui sont rompus ».
Et de continuer : « Dans la justice restaurative, on considère que l'auteur des faits a non seulement offensé la victime mais aussi cassé des liens fondamentaux avec la société ». C'est donc à trois qu'il faut reconsidérer les choses : l'auteur des faits (appelé aussi l'infracteur), la victime et la société civile.
L'exemple le plus frappant de cette justice restaurative, ce sont les rencontres détenus / victimes, assez répandues au Canada et au Brésil. Pour l'heure, il n'y en a eu qu'une en France, organisée en 2010 à la Maison centrale de Poissy, dans les Yvelines, en partenariat avec l'INAVEM, le SPIP de Versailles et l'ENAP. D'autres semblent se préparer, tout doucement et avec moult précautions. Car si cette idée séduit certains, surtout au vu des résultats obtenus, elle réfrigère les autres, qui crient déjà au scandale.
« Faire bouger les lignes »
On traite ses pionniers d'apprentis-sorciers, on les accuse de jouer avec le feu. Alors même que les principaux intéressés sont sortis de cette expérience grandis, apaisés, soulagés. Il n'empêche, ces réticences sont compréhensibles, et viennent de très loin, comme l'explique Sabrina Bellucci, directrice de l'Inavem, l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation.
« Les rencontres détenus / victimes nous troublent, nous bousculent, nous amènent à dépasser ce que nous sommes, nos a priori, commente-t-elle. Elles participent à ce défi qui consiste à faire bouger les lignes, à faire se rencontrer des mondes qui ne devraient pas normalement se rencontrer. Ces rencontres nous gênent dans nos certitudes : le blanc / le noir... la victime / le bourreau... Mais ces rencontres nous permettent aussi d'envisager l'autre différemment, avec une lecture complexe, plus humaine. »
Sabrina Bellucci le reconnaît : il n'est pas facile pour elle de trouver et d'accompagner des victimes volontaires. En revanche, pour celles qui ont franchi le pas et accepté cette démarche hors du commun, il y a vraiment eu un « avant » et un « après ».
• La justice restaurative. Pour sortir des impasses de la logique punitive, de Howard Zehr, chez Labor et Fides, 2011
• Les rencontres détenus-victimes. L'humanité retrouvée, de Robert Cario, chez L'Harmattan, 2012