Que faire si l'on est victime de la violence de son/sa conjoint(e)? A qui s'adresser?
Liliane Daligand : Je dirais que déjà, dès la première violence, quelle qu’elle soit, il faut dire d’un ton ferme : non plus jamais. Certains hommes et certaines femmes qui sont auteurs de violence, peuvent se rendre compte que c’est inadmissible, que c’est une infraction à la loi. Elles vont avoir un raisonnement critique et elles ne recommenceront pas. Vraiment. J’en ai rencontré, je peux le certifier. Ces femmes-là qui ont été victimes une fois, on ne les considère jamais comme des femmes battues ou victimes de violence, parce qu’elles ont eu l’autorité et la fermeté pour s’imposer. Si l’on n’en n’est pas capable, les violences se répètent. Et la seule solution c’est la séparation. Je crois vraiment qu’il faut partir. Surtout si ce sont des violences psychologiques qui se répètent, avec la volonté de domination, d’enfermement et de séquestration.
Faut-il partir le plus vite possible en fait ?
L.D : Oui partir. Je crois que l’on n’est pas de taille pour lutter avec un véritable violent, ceux qui sont décrits dans les livres, dans les témoignages, ceux que l’on appelle les pervers narcissiques. Ils sont violents en permanence, on ne peut pas retrouver des cycles de la violence chez eux. Ils sont en permanence dominateurs, très agressifs en paroles, en gestes. Ceux-là il n’y a pas de cycles. C’est en permanence. Je crois que là on ne peut pas s’en tirer seul, il vaut mieux partir. Ou alors, il faut se faire aider. Mais je prône toujours le recours à la justice. Ce n’est pas la main courante. Je dis qu’il faut absolument qu’il y ait une plainte, une véritable plainte. Dans un guide de l’action publique pour les violences conjugales, c’est ce qui avait été dit et redit fermement. La main courante c’est quelque chose que l’on peut parfois faire quand on pense que ça pourrait servir dans une séparation, un divorce, pour prouver que l’on a été victime. Mais je crois que la manière la plus saine d’arrêter la violence, c’est le recours à la justice. C’est donc la plainte, soit chez les gendarmes, soit chez les policiers, soit en écrivant au procureur de la République. Je voudrais insister, une victime peut porter plainte là où elle veut sur le territoire français. C’est-à-dire, qu’elle n’est pas obligée de porter plainte là où elle habite, ni là où les faits ont eu lieu, mais sur n’importe quel lieu. Et ça, les victimes ne le savent pas. Parfois, les gendarmes ou policiers ne le leurs disent pas. Alors que c’est parfois difficile de porter plainte, là où on habite. Parce que soit on les connaît, soit ils connaissent l’auteur. Ça va être beaucoup plus difficile. Si ce n’est pas possible d’aller porter plainte oralement, on peut écrire. On peut écrire à la police, aux gendarmes ou au procureur de la République, qui va ensuite diligenter une enquête. On peut aussi avoir un avocat, qui va vous aider à porter plainte, ou une association d’aide aux victimes, spécialiste ou généraliste, qui va ensuite vous aider pour ce dépôt de plainte, qui selon moi, est indispensable pour rompre avec la violence.
Liliane Daligand, professeure de médecine légale Université Lyon 1, psychiatre,expert près la CA de Lyon, médecin légiste CHU Lyon, est membre du Conseil scientifique de France Victimes
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